L'engouement pour le style Art nouveau refait surface. Connaissez-vous les caractéristiques du style nouille et l'ambiance de la Belle Epoque ? Connaissez-vous les sources d'inspiration ? Comment ce style, qui n'a fait qu'une flambée, descendit dans la rue ?
L'Art nouveau et la belle époque
Commençons par situer le contexte historique.
La « Belle Époque », cette quinzaine d’années qui précèdent la Grande Guerre de 1914, a marqué toute une génération.
Durant toutes ces années, personne n’a jamais parlé de Belle Époque. L’expression n’a été utilisée qu’en 1919 en souvenir de ces belles années. Progrès sociaux, économiques, technologiques, mais pas seulement.
La Belle Époque symbolise des années foisonnantes d’une grande richesse artistique, aussi importantes que celles dites « classiques ». Suivront les années d’après-guerre, appelé « les Années folles« .
Ce foisonnement d’idée s’explique par la volonté des artistes de transgresser l’art classique en s’affranchissant des règles préexistantes. Voici comment l’Art nouveau est né.
Quoi de mieux que l’expression des fondateurs de l’association des artistes Secessionnistes Viennois pour expliquer ce bouleversement :
« A chaque époque son art, à l'art sa liberté ! »
Devise de la Sécession viennoise, 1897 Tweet
À cette période de notre histoire, la France entière redécouvre le plaisir de la fête. La Belle Époque, c’est aussi la naissance des grands cabarets, les folies bergères, le moulin rouge, des lieux où pour la première fois, toutes les classes sociales se côtoient, artistes, bourgeois, ouvriers.
Les affiches de Toulouse Lautrec en sont la parfaite illustration.
La première d’entre elles, celle du Moulin-Rouge, représente la vedette « La Goulue » dansant le cancan, entourée d’une foule compacte :
L'Art nouveau, qu'est-ce que c'est ?
L’Art nouveau, comme son nom l’indique, rompt les amarres avec le passé. La fin du XIXe siècle avait vu s’épanouir le style Napoléon III, qui n’avait été qu’une simple adaptation de toutes les époques précédentes. Autrement dit, aucun modernisme, dans le sens de la nouveauté, n’avait marqué la fin de cette époque.
C’est le début d’un grand changement :
Et voici que brusquement, la vie change : l’industrie prend naissance sur une grande échelle (2ème révolution industrielle); on découvre à la fois l’aviation, le téléphone, et l’utilisation de l’électricité.
Le progrès technique, accompagné de quatre décennies de paix, provoque un grand optimisme et une insouciance quant à l’avenir.
Ce n’est pas tout.
La condition sociale subit également de profonds changements, les hommes, issus du peuple, commencent à s’affirmer et s’imposer dans la société. Il est alors normal que ces bouleversements s’accompagne d’un renouveau des artistes, un changement d’expression.
Ce sont les débuts de l’Art nouveau, où plus précisément du Modern Style.
En effet, l’expression « Art nouveau» est employée pour la première fois par Edmond Picard, en 1894, dans la revue belge L’Art moderne pour qualifier le travail de l’artiste belge Henry van de Velde.
On parle alors de style 1900.
L‘Art nouveau se définit par une souplesse des lignes, une certaine sensibilité qui entre dans le quotidien. Il y a une nouveauté, un modernisme, de la couleur, et même une extravagance pour l’époque.
Cela s’exprime dans tous les domaines artistiques, en passant par les bijoux, le mobilier, les objets d’art, et même l’architecture. L’Art nouveau occupe tout l’espace disponible pour créer une véritable univers personnel. Il est total, pour créer un lien art et vie.
Pour résumer, rien ne ressemble au passé, et rien ne ressemblera à l’avenir.
Ce style naturaliste a inspiré notre collection de bijoux Art nouveau. Passionné par l’art verrier, héritage d’une longue tradition familiale, nous avons façonné cette rosace de cristal, sublimée par un cordon réglable qui s’adapte sur tous types de poignets.
L'Art nouveau et le Modern Style touche toute l'Europe
Ce nouvel esthétisme commence à s’imposer en Belgique, où Bruxelles est un haut lieu. Les principes formels d’une architecture Art nouveau y sont définis.
Peu à peu, le mouvement, qui prendra différents noms suivant les pays s’impose dans l’Europe entière, et même aux États-Unis. C’est soudain, et très rapide !
Liberty, Jugendstil, Sécession ?
Cela vous dit quelque chose ? Partout, et en même temps, le style commence à éclore, pour ne toucher qu’une partie de la population (nous allons voir pourquoi plus tard).
Les lignes droites se transforment peu à peu en courbes.
En Italie, le mouvement Art nouveau prend le nom de Liberty, en Allemagne, ce sera le Jugendstil, et enfin, la Sécession pour Vienne.
Le Modern Style et L'Art Nouveau, quelles différences ?
Le Modern style pour la fin du siècle
La principale différence réside dans l’époque, le Modern Style est le précurseur de l’Art nouveau, qui montre le rôle joué par l’Angleterre. Ce terme était utilisé par les journalistes pour qualifier l’architecture et la décoration de la fin du siècle.
Un grand bouleversement :
Il y eu un tel changement dans la conception des meubles, des objets, des bijoux, de l’ornementation qu’on peut s’étonner d’avoir assisté, à un engouement aussi rapide, et qui pour être satisfait, nécessitait des dépenses importantes.
Le Modern Style était plus une mode de gens riches; qui ne toucha pas les couches les plus profondes de la société, car il fallait tout changer pour « être à la mode ».
On peut voir le Modern Style comme l’ultime rempart, l’ultime défense contre ce qui va découler fatalement de l’industrialisation, la production en série.
Le plus important :
Il ne faut pas oublier que l’Art nouveau qui en découlera se voulait être un Art pour tous, rendu accessible grâce à la production en série. Contrairement au Modern Style, l’Art nouveau touchera toute la société.
Voici un premier élément de différenciation.
L’Art nouveau de 1900
Pour un grand nombre d’entre nous, 1900 représente une certaine image d’une époque révolue, même si quelques vestiges sont encore présents. Celle d’une entrée de métro sinueuse à l’instar du Metropolitain, un cadre floral où se rencontre nénuphar et ombelles …
Mais surtout, l’Art nouveau est le fer de lance d’un artisanat d’art, désireux de mettre en avant le savoir-faire des artistes, artisans, ouvriers !
Combien de temps a duré l'Art nouveau ?
Il n’est pas facile de déterminer la période du Modern Style, puis de l’Art nouveau qui lui succède. On peut néanmoins en donner les dates approximatives.
Les dates de l'Art nouveau ?
L’Art nouveau a prospéré durant vingt à vingt-cinq années au maximum. Ce courant débute en 1890-1895 pour terminer à la veille de la Première Guerre mondiale.
Son expression artistique atteindra son apogée en 1900 avec l’Exposition universelle.
L'Exposition universelle de 1900
Pour l’Exposition universelle de 1900, la France attendait plus de 50 millions de visiteurs, bien plus que la population de la France à cette époque, qui était de 38 millions !
Le grand palais fut construit pour l’événement. C’est l’un des fleurons de cette exposition.
Pour cet événement, la ville de Paris fut métamorphosée, toutes les grandes nations participèrent et y édifièrent des pavillons, des palais, jusqu’au pied de la tour Eiffel, la grande dame de fer, qui elle-même, avait été la reine de la précédente exposition, celle de 1889.
Cet événement majeur, point de rencontre des savoir-faire, fut l’occasion de présenter les grandes innovations.
Parmi elles, l’électricité, Paris s’équipe de ses premières centrales électriques. Les artistes Art nouveau de Nancy seront les premiers à habiller la lumière de cristal.
L’Exposition universelle de 1900 récompense Daum d’un Grand Prix et lui apporte une notoriété internationale. Novatrice, la cristallerie Daum habille déjà la lumière électrique avec du verre et s’associe à de grands artistes : Majorelle ou encore Henry Bergé.
À cette époque, l’électricité est essentiellement utilisée pour l’éclairage.
Dans certaines campagnes, les habitants continuaient à s’éclairer à la lampe à pétrole, et ce même après la Deuxième Guerre mondiale.
Qu’en est-il du Modern Style ?
Il est encore plus court et fugace. L’expression Modern Style s’efface dès 1910 pour laisser place à l’Art nouveau. Oui, le Modern Style est mort aussi vite qu’il est apparu. Mais pourquoi ?
Deux raisons principales l’expliquent :
- Cet Art, expliqué précédemment, a bouleversé l’expression artistique, étant une nouveauté jamais connue par le passé. Comme pour tous bouleversements, il y a ses détracteurs. Beaucoup étaient contre ce mouvement et il fallait être bien audacieux, même d’avant-garde, pour sacrifier à un bouleversement aussi radical de son mobilier.
- La deuxième raison : le prix. Les meubles et les objets étaient de vrais chefs-d’oeuvre, qui ne supportaient pas la médiocrité. Cet art ne s’adressait pas à toutes les bourses.
Ainsi, le Modern Style était réservé à une certaine élite de l’époque. Il n’était pas connu des provinciaux et encore moins des campagnards.
Le prolongement de l'Art nouveau
Le Modern Style est abandonné pour se prolonger dans un Art nouveau qui s’impose dans un nombre croissant de ville, étant beaucoup plus populaire.
Savez-vous le plus étonnant dans cette histoire ?
Dès la fin du Modern Style, on s’empressa de bazarder et de vendre tout ce qu’on avait acheté durant ces années !
Les ensembles du Modern Style trouvaient une seconde vie dans les maisons de campagne, meublant les chambres des domestiques. Pour les moins chanceux, ils étaient détruits.
Nous avons constaté le même phénomène avec les vases Gallé. On les vendait, on les donnait, même à ceux qui vous étaient le plus indifférent.
De quoi s’en mordre les doigts …
Il suffit de voir la flambée des prix aujourd’hui. Un vase Gallé, produit avant 1904, année de sa mort, peut atteindre plusieurs dizaines voir centaines de milliers d’euros.
C’est un tout autre sujet, que nous vous présentons dans notre guide pour acheter et vendre un vase Gallé.
L’effervescence de cette époque était tellement importante qu’une partie de la population a ressenti un sentiment de honte de cette ivresse incontrôlée.
C’est une des raisons de la rareté de ces objets Art nouveau, en particulier les ensembles de mobiliers.
La Belle Époque marque également les prémices de la publicité, où plutôt de la réclame !
On voit également naître les grands magasins :
C’est nouveau, les grands magasins se multipliaient, la Belle Époque était celle de la consommation. Croissance économique, prospérité générale et insouciance ont créé un environnement propice aux achats.
Amis Nancéiens, savez-vous que l’actuel bâtiment abritant les magasins Fnac et Printemps fut construit pour les grands magasins réunis de la famille Corbin, entre la rue Faubourg Saint-Jean, la rue Mazagran et la rue Victor Poirel.
Tout était étudié pour vendre, vitrines alléchantes, prix sacrifiés, et même vente à crédit.
Les murs de Paris, tout comme ceux de Nancy, étaient envahis par l’affichage publicitaire. Les affiches n’étaient pas sans âme, elles étaient illustrées par les grands artistes Art nouveau de l’époque, un support d’expression parfait.
Les inspirations de l'Art nouveau
Si nous devions résumer l’inspiration et l’imaginaire de l’Art nouveau, seulement trois mots suffiraient : les 3 F (si chères à René Lalique, précurseur du mouvement).
- La féminité
- La faune
- La flore
Ces artistes Art nouveau se sont rendus compte qu’ils avaient à portée de la main et des yeux des motifs qu’ils étaient bien incapables d’inventer.
La nature et la vie prennent alors place dans la vie quotidienne des Français.
La femme objet, source d'inspiration
Jamais aucun style n’a mis autant la femme en valeur. C’est avant tout la femme objet, se retrouvant sur la plupart des sujets traités. La femme prend alors toutes les formes, on la sculpte, elle est céramique, ivoire, et même de verre.
Parfois, elle n’est qu’un symbole et devient alors libellule, notamment dans la composition des bijoux du célèbre René Lalique.
René Lalique sera sans doute le plus grand inspirateur de la féminité, à travers ses bijoux, qui comptent parmi les grands chefs-d’oeuvre de l’Art nouveau.
L’imagination sans limite de René Lalique se métamorphose ici à travers ce bijou femme-libellule, aux deux pattes disproportionnées et griffon acérés.
Portée par Sarah Bernhardt (célèbre comédienne de la Belle époque) au sommet de sa gloire, on ne peut que s’émerveiller sur cette pièce visible au Musée Calouste Gulbenkian de Lisbonne.
Au-delà de l’imaginaire de la femme :
Femme, mais aussi insecte. À cette époque, l’Art nouveau a la ligne des robes que portent les femmes, robes sur lesquelles se retrouvent des motifs interpellant les végétaux et une certaine faune vivant sous terre.
Les végétaux (la flore)
René Lalique ou encore Émile Gallé étaient avant tout de fins observateurs de la nature.
Une observation microscopique, détaillée, qui relève même d’une vraie démarche scientifique, comme pour Émile Gallé, et son travail sur l’évolution des espèces qui sera salué par les professionnels.
Toutes les parties de la fleur, de l’arbre ou de la plante sont utilisées dans la création artistique. Tous les éléments se nouent, s’enchevêtrent, que ce soit en pierre, en fer, en fonte et même en verre.
L’Art total, du mobilier, à la tapisserie, nous immerge alors dans une forêt, où la nature est reine.
Le bijou devient nature :
L’utilisation du répertoire végétal se révèle particulièrement heureuse dans le domaine du bijoux. Étant fatalement limité par l’espace, l’imagination est alors ordonnée, pour donner naissance à une sobriété délicate.
Les insectes (la faune)
Bien plus fantaisiste et imaginatif, inquiétant pour certain, le répertoire des insectes et reptiles s’illustrent pour la première fois.
Libellules, serpents mais aussi pieuvres sont représentés dans les moindres détails. Une recherche de la précision permettant d’offrir les couleurs les plus chatoyantes.
On peut même croire que la génération 1900 cherchait à se faire peur.
Les artistes s’inspiraient de la mythologie, donnaient vie aux monstres les plus étranges à l’image des gorgognes et des méduses.
Les représentations des visages féminins qui terrorisèrent l’Antiquité, trouvent, dans le style 1900, leur plein épanouissement artistique, décoratif et symbolique.
Il faut insister sur le fait que ce sont toujours des visages de femme, que ce soit dans la terreur ou dans le charme, l’homme n’a pas de place dans le style Art nouveau.
On se demandait d’où venait toute cette imagination.
On a même accusé la découverte de la drogue qui donnait à l’imagination une tournure insolite. On a également mis en cause l’absinthe, breuvage très consommé durant la Belle Époque, par les bourgeois et artistes !
L’absinthe représentait 90% des apéritifs consommés !
En réalité, la raison est un peu moins farfelue. En 1900, on dénombre plus de 13 journaux traitant du spiritisme en France.
Le début des années 1900 fut marqué par des progrès sociaux, économiques, technologiques et politiques.
La vie était facile, aisée, joyeuse. Certains alors se penchèrent sur des problèmes qui compensèrent, en quelque sorte, ce bien-être matériel : les problèmes de l’au-delà. Ces formes et monstres apportaient à l’époque une diversion à une existence parfois sans surprise.
L'Art nouveau à travers les artistes
Il n’est pas possible de donner l’initiative du mouvement à un seul groupe.
Cependant, il est indéniable que la ville de Nancy fut l’un des épicentres, considérée comme le berceau de ce mouvement. C’est ici que les plus grands artistes du mouvement se sont exprimés.
Savez-vous pourquoi ?
Après l’annexion de l’Alsace-Lorraine par l’Empire Allemand en 1870, une partie de la population migra à Nancy, désireuse de rester français.
Capitaux, main d’oeuvre et idées offrirent donc à Nancy toutes les conditions requises pour un développement prospère !
Cette richesse s’illustre au coeur de la ville, il vous suffit de suivre ce guide présentant 10 lieux de l’Art nouveau nancéien pour vous en rendre compte.
L'École de Nancy ou Alliance provinciale des industries d'art
En 1901, sous l’impulsion d’Émile Gallé se fonde une école lorraine, connue sous le nom d’École de Nancy.
Son but est le suivant : assurer la continuité du folklore lorrain, mais aussi assurer la diffusion et la protection des oeuvres des artistes et industriels lorrains.
Qui sont les artistes ?
Victor Prouvé réunit sous son influence un groupe dont fera partie Majorelle, Vallin, les frères Daum, Jacques Grüber et naturellement Émile Gallé. L’étrange et l’insolite sont les mots d’ordre. Pour la première fois, on voit des architectes dessiner des mobiliers, afin que ceux-ci soient en harmonie avec le cadre auquel ils sont destinés.
Également connue sous le nom d’Alliance provinciale des Industries d’Arts, l’oeuvre de l’École de Nancy est admirablement présentée dans l’un des plus beaux musées de France.
Situé dans l’ancienne propriété d’Eugène Corbin (le propriétaire des magasins réunis de Nancy), grand mécène de l’Art nouveau, le musée de l’École de Nancy vous plonge 120 ans en arrière.
C’est l’une des rares représentations totales de l’Art nouveau, à l’image de la salle à manger Masson d’Eugène Vallin et Victor Prouvé.
Émile Gallé
Débutons par le grand maître de l’Art nouveau, Émile Gallé. Né le 4 mai 1846, il meurt à Nancy le 24 septembre 1904.
Émile Gallé reprend la direction de l’industrie paternelle et ne tarde pas à produire une série d’oeuvres artistiques. Maître verrier, il a obtenu du verre de nouvelles transparences. La marque distinctive de ses vases s’exprime à travers une signature gravée en relief.
Jusqu’en 1894, date à laquelle il crée sa propre cristallerie à Nancy, Émile Gallé fait exécuter le travail à chaud de ses oeuvres à Meisenthal.
Patriotique, il accompagne souvent sa signature de la Croix de Lorraine, une manière personnelle de montrer son désir de rattachement à la France des provinces annexées.
Botaniste distingué, il a contribué au développement de l’horticulture nancéienne par de nombreuses publications : ce goût pour les végétaux explique le thème général de ses compositions.
Louis Majorelle
Dès son plus jeune âge, Louis Majorelle s’intéresse et travaille aux côtés de son père qui possède un atelier de décoration. Dès onze ans, il vend sa première création en céramique.
À 20 ans, il prend la succession de son père et rejoindra l’École de Nancy aux côtés d’Émile Gallé. L’Exposition universelle de 1900 récompense son travail, qui reçoit un accueil triomphant.
Hector Guimard
Né à Lyon en 1867 et mort en 1934, Hector Guimard est l’un des représentants les plus marquants de l’architecture Art nouveau.
Pour lui, l’architecture et la décoration formaient un tout. Il estimait que l’édifice, l’ameublement, et le décor intérieur avaient besoin d’une unicité directrice.
S’étant vu confier le dessin et l’exécution des accès du métro, Hector Guimard a appliqué ses principes décoratifs, qui ont pu étonner les parisiens pour l’époque.
Et pour cause :
Ses grands lampadaires, à l’image de pattes géantes d’insectes, semblent être sur le point de vous croquer !
« Ces édifices tortueux de lignes et de tonalité malsaine issues des profondeurs de l'apocalipse, ces lampadaires étranges, sortes de bras dressés sur des queues de fonte, tenant entre leurs crochets des fruits de verre en forme de berlingot à demi-sucés »
Documentaire vidéo Hector Guimard Tweet
Hector Guimard, c’est également le Castel Béranger, LE manifeste artistique de l’artiste.
Fait de brique, de fonte, de bois et céramique, Hector Guimard obtiendra le 1e prix de la plus belle façade de la ville de Paris en 1898, concours organisé par le journal Le Figaro.
L’époque 1900 s’illustre dans la rue.
Hector Guimard en sera le parfait exemple. Façade d’immeuble, balcon, hall d’exposition et métro, voici ce à quoi nos rues françaises ressemblaient au début du XXe siècle.
L'art nouveau dans la rue
Les inspirations des artistes sont sans limite, et se propagent même dans la rue. Des vestiges du style 1900 sont devenus des emblèmes, parfait même des musées.
Certains sont classés, comme le Céramic Hôtel, avenue de Wagram, à Paris.
Les immeubles
Les immeubles du Modern Style et Art nouveau affichent un haut standing.
Façades en pierre, elles sont sculptées de motifs floraux, végétaux, et parfois de sculpture féminine où la longue chevelure habille les encadrements de fenêtres.
Trois caractéristiques :
- L’utilisation du fer forgé sur les balcons et les portes, permettant de créer des mites ondulants.
- Les bow windows, très à la mode, forment de petits arcs aux fenêtres.
- L’utilisation de nouveaux matériaux pour la construction, comme la céramique, dont Bigot fut l’un des maîtres.
Et par-dessus tout, on remarque que les maisons et immeubles s’individualisent.
Aucun immeuble n’est de même conception. Chaque maison propose son propre tableau fleurit. Les réalisations architecturales ne se ressemblent pas plus que ne peuvent se ressembler entre eux les jardins, même s’ils sont composés des mêmes fleurs.
Ce seront les architectes Guimard, Roche, Lavirotte, Horta pour la Belgique, qui donneront vie aux rêves les plus fous.
Ces balcons vitrés en avancée sur la façade se voulait remplacer un petit jardin, impossible à établir à l’étage.
Cette idée vient de nos amis anglo-saxons, le Blow Window permettait ainsi d’agrandir une pièce et de mieux l’éclairer.
On y met des plantes, des fleurs, et même des oiseaux en cage. Cet élément disparaitra totalement après la Première Guerre mondiale. Les architectes ont vite compris la complexité d’édifier une pièce ainsi en porte-à-faux.
Les grands magasins de la Belle Époque
Nous en avons fait mention précédemment. La Belle Époque, c’est celle de la consommation, de la réclame et tout naturellement celle de la création des premiers grands magasins.
Les architectures font entrer la lumière :
C’est aussi celle de la découverte d’un utilitaire artistique. On prend alors un soin particulier à décorer tout ce qui peut l’être. Pour compenser ce qu’une armature métallique peut avoir de lourd, on lui adjoint le verre : les coupoles se font transparentes, multicolores et le soleil joue librement à travers elles.
Cette impression de luminosité plait à la clientèle :
Toutes les grandes expositions sacrifient à la même tendance : salon de l’automobile, salon des arts, tous peuvent enfin voir les couleurs telles qu’elles le sont à la lumière du jour.
L’un des exemples les plus réussis reste celui de l’hôtel Solvay à Bruxelles.
Métro et réverbères
Le Métro de Guimard, emprunté par des millions de voyageurs chaque année, est à lui seul un mémorial de cette époque.
Le choix n’a pas été facile.
Après avoir examiné quarante projets qui ne lui plaisait pas, le conseil municipal de Paris pris la décision de confier à Guimard le dessin des entrées et des gares du métro parisien.
C’était un honneur d’être choisi pour caractériser un moyen de transport aussi révolutionnaire.
Sans le savoir, Guimard fut le premier styliste.
Ainsi, il logea des ampoules électriques dans des corolles, et se servi des tiges de fleurs pour élaborer cet arc d’entrée que tous connaissent bien.
Il utilisa la fonte, imposé, mais également le verre, pour créer de gracieuses verrières.
Les éclairages des rues ont subi cette influence, et des réverbères Modern Style firent leur apparition. Au lieu d’une lumière verticale comme il était d’usage, ils diffusèrent une lumière plongeante.
Les affiches
Les affiches descendent dans la rue, et c’est une innovation pour la fin du XIXe siècle. Avec la croissance économique, les industriels et commerçants rivalisent d’ingéniosité pour faire connaître leurs produits.
L’affiche Art nouveau, quelles caractéristiques ?
- Elles sont très colorées, et doivent frapper l’oeil.
- Elles doivent refléter l’esprit de la Belle époque.
Rien qu’en regardant une affiche de cette époque, on a un aperçu global de l’ambiance. Aucun mode d’expression ne donne autant que l’affiche, la physionomie d’une époque et d’un peuple.
C’est d’ailleurs pour cette raison qu’un bon nombre d’amateur les collectionnent. Si vous souhaitez en acheter une, découvrez notre article sur l’affiche Art nouveau. Chaque pays a ses peintres d’affiches qui, même après plus d’un siècle, sont restés célèbres : Cheret, Toulouse Lautrec, Steinel, Atché …
Sans oublier Mucha, de la sécession de Vienne :
L'Art nouveau dans la maison
C’est le moment de franchir la porte d’entrée, afin d’y découvrir les bouleversements de la décoration du style 1900.
Franchissons une entrée d’immeuble, attendons l’ascenseur, qui n’est déjà plus une nouveauté, et voyons l’influence de l’Art nouveau dans la vie quotidienne.
C’est radical.
Pour la première fois dans l’histoire de l’ameublement, il fallait tout changer si on voulait être à la mode. Adieu le style Louis XV, le style Empire, et bonjour à la faune, la flore, la féminité.
La verrerie d'art
Parallèlement au développement de la verrerie mécanique, le verre, au-delà de son aspect fonctionnel et décoratif, va être considéré comme une véritable média artistique.
On assiste alors à une grande liberté créative.
Parmi les plus connus, nous l’avons déjà cité, Émile Gallé. Passionné de littérature et de botanique, les thèmes qui alimentèrent son imaginaire étaient multiples, allant de l’Antiquité à l’art japonisant en passant par le Moyen Âge, la Renaissance, le XVIIIe siècle et la verrerie islamique.
Les meubles
Ce sont le plus souvent des meubles d’architectes, qui reflètent la tendance de son créateur. Ils sont en érable, poirier, chêne, acajou, platane d’Algérie.
Cependant, le matériaux n’est pas essentiel, seule la forme est souveraine.
Les chaises et fauteuils
Modern Style, ils sont perchés sur des pieds grêles qui semblent prêts à se casser sous le moindre poids. Le dossier, formé par un entrelacs de lignes sinueuses, s’orne de tissus assortis aux rideaux de la pièce.
Les chaises de la salle à manger semblent plus stables et solides. Les chaises de bureaux sont plus larges, plus profondes, épousant davantage la forme du corps, recouvert de cuir uni.
Les tables
Il existait deux styles de table :
- Les tables à demeure (celles des salles à manger).
- Les tables volantes (pouvant se déplacer facilement).
On assista à une prolifération de tables volantes, car à l’époque, on recevait beaucoup !
Les femmes, ayant une situation sociale élevée, avaient ce qu’on appelle un jour : c’est-à-dire qu’elle portait sur ses cartes de visite une mention spéciale indiquant quel jour et quelle heure madame se tiendra prête à recevoir.
Chacun des visiteurs avait sa table personnelle, de façon à ne pas jongler avec la table et assiette.
Voici pourquoi la mode des tables gigognes s’est développée.
Les bureaux
Ce qui est nouveau pour l’époque, ce sont les bureaux. Les hommes travaillent à la maison, et sont obligés, parfois, d’avoir chez eux une pièce spécialement meublée pour cet usage.
Les armoires
Issue du second Empire, l’armoire à glace s’ornemente de différentes façons. Elle devient aussi plus pratique. On y ajoute de petits tiroirs dans lesquels il est possible de ranger les accessoires tels que les gants.
Les buffets de salle à manger
Ces meubles sont utilitaires, à une période où l’on restait longtemps à table et où la nourriture était abondante.
Les lits
Étrangement, les lits jumeaux n’existaient pas encore. Le lit reste à deux places et occupe la chambre de Madame. La tête et le pied sont ornés des mêmes sculptures, marqueteries ou peintures que les autres meubles de la chambre.
Les sellettes
Ce petit meuble est typique du style Art nouveau. La sellette servait à supporter un palmier dans un cache-pot en cuivre, ou en céramique. Il semble qu’elles aient disparu avec la mode des plantes vertes, dans les années 1914.
Les bibliothèques
Les bibliothèques de faible encombrement est l’une des nouveautés. La femme se doit d’avoir, dans son salon, la preuve tangible qu’elle s’intéresse à la culture et au monde qui l’entour.
Les vitrines
Survivante des siècles précédents, la vitrine garde toute son importance. Elle donne une note gaie dans la pièce, et permet de passer pour un amateur d’art, ce qui donne lieu à tout un commerce : celui des objets de vitrine.
Le piano :
À cette époque, il n’y avait pas d’intérieur où ne se trouvait un piano : droit chez les gens modestes, à demi-queue, et même à queue chez ceux qui avaient un salon assez grand pour le loger.
L'éclairage
Peu à peu, l’éclairage électrique s’imposa en ville.
Son adaptation sur les lustres rencontra une rapide adhésion. Pourquoi ? Grâce à sa facilité d’emploi, la suppression de l’odeur de gaz, et surtout la disparition du manchon à incandescence.
Les lampes dites volantes rencontrèrent un succès moindre à leurs débuts. Mais face aux risques d’incendie diminués, elles furent adoptées par tous.
Les solutions végétales sont naturellement exploitées à l’extrême : les ampoules sont boules de gui, grains de mimosa, grappes de raisins …
Les bijoux
Le bijou Art nouveau est fascinant. Le style 1900 trouve dans cette forme d’expression une perfection jamais atteinte.
Pourquoi un tel engouement ?
Il faut chercher la cause de cette éblouissante production dans l’importance que le début du siècle a donné à la femme et à tout ce qui la servait.
Le bijou est un objet de parure personnel, toute sa valeur réside dans son interprétation et réalisation. La beauté du matériau en lui-même. L’affichage du beau plutôt que l’affichage du luxe.
Les vitraux
Durant l’Art nouveau, le vitrail connaît une véritable renaissance. Peu à peu, il s’introduit dans les maisons privées et les commerces. Plus particulièrement à Nancy, les vitraux sont présents dans les maisons, les immeubles d’habitation, les magasins et même les banques. Une magnifique façon de créer un espace de transition entre l’intérieur et l’extérieur.
En savoir plus : les vitraux d’église, histoire, symbole, signification.
Voici de quoi vous donner une idée globale du style Art nouveau, mais aussi de la manière de vivre à cette époque. C’est maintenant à vous de percer tous les mystères de l’Art nouveau, et vous découvrirez des objets étonnants, des meubles sans égal, des verreries venues tout droit de vos rêves.
Nous n’avons pas le droit de se moquer du style Art nouveau, style 1900, parfois riche et lourd, car il représente avant tout un grand effort artistique. Il faut le saluer bien bas.
De nos jours, nous regrettons de ne pas avoir une pléiade de créateurs qui fassent évoluer et progresser l’art. Regrettons l’absence de sensibilité au savoir-faire de nos jeunes générations, et partageons cette si belle époque créatrice qu’est l’Art nouveau !
Source : Le style 1900, Marabout Flash.