De passage dans les Vosges du Nord, venez visiter le musée du verre à Meisenthal, animé par une association de bénévole. C'est l'endroit parfait pour comprendre les subtilités de la fabrication du cristal, et ainsi découvrir de magnifiques oeuvres Art nouveau signées Émile Gallé, Désiré Christian ou encore Eugène Kremer ...
Suite à notre visite, nous vous avons fait une petite vidéo présentant quelques chefs-d’oeuvre :
INFOS PRATIQUES DU MUSÉE DU VERRE
1 Place Robert Schumann, 57960 Meisenthal
De Pâques à la Toussaint, tous les jours sauf le mardi, de 14h à 16h, en juillet et août, de 14h à 18h.
Les groupes de plus de 10 personnes sont reçus sur rendez-vous, durant toute l’année et le matin, à l’exclusion du mardi.
- Tarif Musée : plein 6 €, Tarif réduit* 3 €
- Pass famille : forfait 14 €
- Groupe (à partir de 10 personnes) : 5 € / visiteur
Téléphone : 03 87 96 91 51
Découverte du CIAV de Meisenthal
Le site verrier de Meisenthal regroupe trois structures partenaires :
- Le Centre International d’Art Verrier
- Le Musée du verre
- La grande Halle verrière
Dès votre arrivée, nous vous invitons à découvrir la verrerie de Meisenthal et son centre verrier, à deux pas du musée.
C’est ici que les célèbres boules de Noël sont fabriquées.
Pour en savoir plus et préparer votre visite au CIAV de Meisenthal, cliquez ici.
L'histoire de Meisenthal
Avant de plonger au coeur du musée et de ses chefs-d’oeuvre, il convient de vous expliquer les origines de la verrerie de Meisenthal.
Nous sommes au XVIIe siècle. Les maîtres-verriers de cette époque étaient bien différentes de celles que nous connaissons aujourd’hui.
Regardez :
Dans ces temps reculés, la potasse nécessaire pour abaisser la température de fusion du verre était obtenue à partir de cendres de bois, de bruyères et de fougères.
Sans cette potasse, le point de fusion du verre est de 1800°C. Autrement dit, il était presque impossible de l’atteindre, et surtout de le maintenir. Le traditionnel foyer alimenté en bois n’avait guère la puissance nécessaire.
« Le salin, qui provient des cendres d'herbes (fougères d'où le nom de verre de fougères) et de bois, est la matière qui entre dans la composition du verre, la beauté du verre dépend singulièrement de la bonne qualité du salin ... »
Faute de fours assez puissants, les verriers du XVIIe siècle fondaient seulement une petite quantité de verre dans une bassine de taille réduite appelée la fritte.
Le massif de Vosges du Nord présentait tous les avantages pour le développement des verreries. Le grès des Vosges était utilisé comme fondant, mais sa haute teneur en fer ne permettait pas d’avoir un verre de grande qualité.
Ce verre avait une coloration verdâtre. D’où le nom de verre de forêt.
Le plus intéressant ?
Les verreries de cette époque étaient ambulantes. Elles déménageaient suivant l’accès et la quantité de ressources disponibles.
Une fois le bois de la forêt épuisé, les verriers déménageaient l’outil de production, tout simplement. L’acheminement du bois devenant bien trop compliqué sur de longue distance.
C’est l’un des facteurs qui entraîna la construction de verrerie proche des rivières comme à Baccarat. Le bois était alors acheminé par flottaison. Un moyen simple et rapide.
Meisenthal fut donc l’une des premières verreries sédentarisées. C’est en 1702, après l’abandon de la verrerie de Souch (surement par manque de combustible), que trois frères décidèrent de fonder une verrerie.
Meisenthal est né.
Durant la période du renouvellement des arts décoratifs (Art nouveau), Meisenthal s’illustre et atteint l’apogée de sa carrière.
Émile Gallé fera même exécuter une grande partie de sa production ici, à Meisenthal, anciennement verrerie Burgun-Schverer.
Cette période prospère et d’excellence est merveilleusement illustrée à travers l’exposition du musée.
La fin, puis le renouveau
En 1969, la verrerie qui employait encore 300 ouvriers ferme ses portes. Le manque d’automatisation du processus de production lui sera fatale.
L’idée de création d’un Centre International d’Art Verrier germe à partir de 1988. Le bâtiment de la taillerai est rénové et équipé pour le travail du verre. Le centre est inauguré en 1992 et préserve la mémoire du site verrier de Meisenthal.
Aujourd’hui, le Centre International d’Art Verrier compte 18 salariés (dont une équipe de 7 verriers). Leur spécialité : la boule de Noël.
Visite du musée du verre
Les origines du Musée
Dès 1975, dans le but de sauvegarder le patrimoine de Meisenthal, une association bénévole commença à assembler et à collectionner tous les objets et outillages venant du monde de la verrerie.
On peut le dire, après l’abandon de la verrerie de Meisenthal en 1968, la récolte fut bonne, malgré le pillage de certains ferrailleurs.
La décision de créer un musée est prise dès 1976. Le travail bénévole, accompagné de l’aide de la commune permettent de créer la Maison du Verre et du Cristal, le 9 juillet 1983.
Nous tenons à remercier les bénévoles pour leur accueil et explication lors de notre visite, bravo à eux !
La Maison du verre et du cristal
Dès l’entrée du musée, une vidéo explicative regorgeant d’explications vous plonge dans l’art du feu.
- La première partie du Musée s’intéresse à l’aspect technique du verre et du cristal
- La seconde partie, à l’étage, présente l’exposition artistique, orientée Art nouveau
1) Visite du rez-de-chaussé et de l'exposition technique
La première étape du musée nous présente les outils et les composants nécessaires à la fabrication du cristal.
Afin de donner un caractère homogène à cette exposition, les différents objets présentés viennent du début du XXe siècle.
Le four à pot
Un four traditionnel à pots ou creusets a été reconstitué en grandeur réelle au centre de la halle. À l’époque du bois et du charbon, la chaufferie se trouvait au sous-sol et le foyer avait approximativement la hauteur d’un étage !
Actuellement, les fours sont alimentés par du gaz naturel. La température de fusion du verre et du cristal est de l’ordre de 1450°C.
Il faut savoir que ces pots sont entièrement façonnés à la main. C’est le cas à la cristallerie Saint-Louis qui possède son propre atelier au sein de la manufacture.
Ce sont des récipients en terre dans lesquels se fait la fusion de la matière. La durée de vie d’un pot avoisine les trois mois, après, il faut le remplacer par un nouveau.
La composition du cristal
Le verre, ou cristal, n’est rien d’autre que du sable. On utilise le sable blanc de la région parisienne pour obtenir un verre parfaitement incolore (et non plus le grès des Vosges).
Pour aller dans le détail, nous vous invitons à lire notre article sur la composition du cristal et la différence avec le verre.
Voici les éléments essentiels pour obtenir du cristal, une vraie recette de cuisine :
- L’arsenic est un décolorant, son but est de neutraliser les impuretés.
- La potasse et la soude sont les fondants qui permettent d’abaisser la température et le temps de fusion.
- Le groisil, débit de cristaux réutilisé en composition.
- Le minium de plomb, qui offrira la pureté et l’éclat du cristal (au minimum 24%).
Enfin, la couleur du cristal est obtenue par l’ajout d’oxydes métalliques (chrome, nickel…)
Un grand nombre d’anciens moules sont également présentés. Ces moules n’ont presque pas changés, comme la plupart des outils du verrier.
Il existe quatre moules aux techniques différentes :
- Le moule soufflé-tourné permet de souffler à la canne. Il a une forme ronde et lisse à l’intérieur. Le fait de tourner permet d’éliminer les coutures du cristal.
- Le moule de soufflé-fixe présente en général un décor à l’intérieur. Le décor est apparent sur les faces internes et externes du verre.
- Le moule de presse ancien.
- Et enfin le moule de presse moderne à décor d’imitation de taille.
Toutes les techniques verrières sont illustrées.
Si vous souhaitez aller plus loin, nous vous avons cocoté un petit guide sur la fabrication du cristal, disponible ici !
2) Visite de l'Exposition Art nouveau
À l’étage, dans une ambiance feutrée, l’exposition artistique révèle une collection d’une grande richesse.
L’accent est mis sur la verrerie Burgun-Schvever. Toutes les pièces exposées permettent au visiteur de poser un regard différent sur l’art du verre. On se rend vite compte de la complexité du travail réalisé.
Cette époque créatrice foisonnante qu’est l’Art Nouveau a porté l’expression artistique à son plus haut niveau.
La verrerie d’art fut un moyen d’expression parmi tant d’autre. C’est l’époque d’un réel désir de mettre l’artisanat et le travail ouvrier sur le devant de la scène.
Quoi qu’il en soit, il n’est pas certain que nos verriers puissent reproduire de tels chefs-d’oeuvre.
Certaines techniques, si complexes, telles que la marqueterie sur verre ou le décor à l’émail intercalaire, furent oubliées avec leur créateurs.
Marqueterie sur verre, dont le grand maître fut Émile Gallé
Autre artiste de génie, presque inconnu du grand public, Eugène Kremer.
Il sera à l’origine de la technique du décor à l’émail intercalaire typique de la production Burgun-Schverer (anciennement Meisenthal).
La coupe du pêcheur, cette grande coupe sur pied est une pièce réalisée en 1901 par Eugène Kremer pour une commande privée.
Elle comprend à sa périphérie quatre décors aquatiques avec l’inscription à l’or : “priez pour nous pauvres pêcheurs à la ligne”.
Les décors sont gravés à l’acide, partiellement remis à la roue et rehaussés de touches d’émail et d’or.
Cette coupe est l’une des rares pièces connues portant la signature d’Eugène Kremer, l’artiste signant habituellement les oeuvres sous le nom d’Émile Gallé, son employeur.
Eugène Kremer est un enfant de Meisenthal. Resté dans un anonymat presque total, ce génie artistique a obtenu la confiance totale d’Émile Gallé.
Vase à décor mythologique
Ce vase couleur miel de forme coloquinte en verre soufflé est signé de la marque Burgun-Schverer. Ce décor mythologue représente Atlas portant la voûte céleste et le routour d’Ulysse.
Gravé à l’acide et rehaussé d’or, les décors mythologiques réalisés par Eugène Kremer à partir de 1889 sont les copies fidèles des dessins de Walter Crâne qui a illustré un ouvrage sur la mythologie “Echoes of Hellas – The Tale of Troy and the Story of Orestes” édité à Londres en 1887.
Vase à la carpe
Ce vase en verre soufflé à côtes vénitiennes présente un décor de carpe et de végétation aquatique à l’émail et à l’or qui s’inspire d’un tableau d’Hokusaï, célèbre peintre japonais.
Créé en 1878, c’est l’une des premières pièces en verre clair de lune. Quatre exemplaires sont connus, en analysant méthodiquement l’oeuvre, on aperçoit des côtes vénitiennes torsadées à l’intérieur du vase.
Ce modèle fait partie de la collection de Désiré Christian. Bluffant de réalisme, le verre coloré d’un léger bleu symbolise une eau clair qui semble être en mouvement grâce au travail des côtes vénitiennes.
Vase signé Vallérhystal
Une vitrine est également consacré à Vallérysthal. Mémoire ouvrière, la cristallerie de Vallérysthal a dessiné l’histoire d’une industrie régionale florissante.
L’une des plus anciennes manufactures verrières (associée à Portieux dès 1871) produisait plus de 50000 pièces par jour, employant plus de 3000 artisans verriers.
Auguste Houillon, Saint Bernard de Menthon, 1885-1954
Désiré Christian
Source : La maison du verre à Meisenthal, SAEP Edition.
LES AUTRES MUSÉES DU VERRE ET CRISTAL EN FRANCE
Fier de notre patrimoine et de notre savoir-faire verrier, la France regorge de musée témoin de notre histoire.
Les musées du verre dans les Vosges du Nord, et plus particulièrement en Lorraine, sont nombreux. Une implantation conditionnée par trois facteurs : la matière première, le combustible et l’eau.
Et si vous désirez poursuivre la découverte de la région, lisez notre guide : que faire dans les Vosges ?