1900 marque la dernière Exposition Universelle se déroulant à Paris, l'une des plus symboliques. C'est officiel, l'électricité éclaire le monde. Les artistes verriers de l'École de Nancy, dont les frères Daum, se prépare à être les premiers à habiller le verre de lumière à travers lampes et appliques. Bref roman des artistes Lorrains.
Les prémices de l'électricité
Si la lampe Daum fut l’une des premières à mêler le verre au métal, il est important de se pencher sur l’histoire de cette découverte historique.
La découverte et la maîtrise de l’électricité interviennent en 1900, mais ses bréviaires remontent à 1800 avec Alessandro Volta, chimiste italien, qui invente la première pile de l’histoire de l’humanité, appelée pile voltaïque.
Suivra Thomas Edison, qui en 1879, présente la première ampoule permettant d’éclairer le monde. Le fondateur de la General Electric aura testé un total de 6000 fibres végétales avant de trouver l’heureuse élue : la fibre de bambou du Japon.
C’est le top départ des premières centrales électriques. Un autre homme va s’imposer comme le grand scientifique du XXe siècle, parfois considéré comme un magicien, c’est Nicolai Tesla.
Tesla et Edison seront d’éternel rivaux avec deux visions opposées :
- Celle d’Édison, d’un courant continue allant d’un point A vers un point B, qui pâtit d’une forte perte de puissance.
- Celle de Tesla qui prône la solution du courant alternatif, qui va d’un point A vers un point B, puis revient formant ainsi une boucle. Ce système avantageux permet de transporter l’électricité sur de grande distance.
Malgré les désaccords entre les deux scientifiques, Nikola Tesla est appelé en renfort, à l’âge de 28 ans, aux États-Unis par ce même Ddison qui rencontre des difficultés à édifier le réseau électrique de New York. Après un mois de travail, le génie de Testa permet de trouver la solution.
Contre toute attente, Nikola Tesla se fera léser sur sa rémunération. Hedison lui avait promis 50 000$, promesse non tenue prétextant que Tesla n’a pas compris « l’humour américain ».
Suivra une longue période d’errance et de misère jusqu’à la rencontre de son ami industriel George Westinghouse, célèbre pour ses contributions dans le domaine du chemin de fer.
Tesla réussi à convaincre les industriels de s’équiper en courant alternatif. Suivra une guerre des courants qui laissera les deux compagnies, Westinghouse et General Electric, proche de la faillite.
Nikola Tesla était également un homme de scène. Il prêtait un malin plaisir à réaliser de fabuleuses démonstrations électriques lors d’Exposition universelle. Il n’hésitait pas à utiliser son propre corps comme conducteur devant les yeux ébahis des spectateurs.
Lors de l’Exposition universelle de 1900, le Palais de l’Electricité, alimentant tous les stands, est le clou du spectacle. Il est désormais l’heure pour les artistes du monde de s’attarder sur l’invention du siècle.
Dès 1900, les premières lampes Daum font leur entrée
1900 marque l’apogée, l’acmé de l’Art nouveau.
Plus de 48 millions de personnes se rendre à Paris lors de l’Exposition universelle, marquée par le nouveau siècle. La célébration est gigantesque, plus de 40 pays participants pour un total de 83000 exposants !
Présents à cet événement, les frères Daum repèrent tout le potentiel commercial de cette invention. Pour eux, il est impératif d’investir ce nouveau domaine pour devenir l’un des premiers verriers à habiller le verre.
L’appareillage électrique témoigne de l’engouement que provoque cette énergie nouvelle. C’est l’un des grands succès de la manufacture Daum. Ils seront les premiers à commercialiser des lampes Daum et luminaires, extrêmement raffinés, mêlant verrerie d’art et ferronnerie.
Si ces derniers ne sont pas réellement les précurseurs du style naturalisme au sein de la verrerie d’art, ils ont le mérite d’avoir devancé le grand Émile Gallé dans la production de luminaire.
Daum s'associe aux membres de l'École de Nancy, dont Louis Majorelle
C’est bien connu, le succès est souvent le résultat d’une œuvre collective et non individuelle. L’École de Nancy en est la parfaite illustration.
Louis Majorelle est plus connu en tant qu’ébéniste que ferronnier. Suite au décès de son père, il se doit de reprendre le petit commerce familial de fabrication et vente de meuble. En l’espace de quelques années, sous le génie créatif du fils, l’entreprise atteint des sommets, devant faire face à un volume toujours plus important de commande.
Passant de 20 employés à plus de 250, son succès réside dans la qualité irréprochable de ses meubles, mais également dans une constante remise en question et une curiosité insatiable.
En 1890, Louis Majorelle lance un atelier consacré au travail du métal afin de créer divers éléments décoratifs, dont des entrées de serrure, des plaques de propreté, et des poignées de tiroir pour ses meubles.
Bronze, cuivre ou fer forgé, l’artiste voit tout le potentiel de cette matière dès la fin du XIXe siècle.
Les frères Daum font appel à Louis Majorelle dès 1902 pour la réalisation de lampes à poser.
D’un côté, les ateliers Majorelle dessinent et produisent les pieds des lampes, en fer forgé ou en bronze. De l’autre, la manufacture Daum produit la verrerie associée guidée par le thème central, à l’instar du dôme de la lampe.
Cette collaboration fructueuse va faire de la lampe une pièce emblématique de l’Art nouveau, aux côtés des vases Daum.
L’ensemble de l’œuvre est alors édifié sous l’œil avisé des plus grands artistes de l’École de Nancy. Rien n’est laissé au hasard, la ferronnerie et la verrerie sont en symbiose parfaite.
L’ornementation du pied de la lampe Daum et son côté robuste se marient à merveille à la luminosité et à la transparence du verre. Peu à peu, ces modèles de lampes vont conquérir le tout Paris. Les créations Daum/Majorelle sont présentées pour la première fois à l’Exposition de l’École de Nancy à Paris en 1903.
Aujourd’hui, ces pièces sont de véritables œuvres d’art, exposées dans des musées comme les Beaux-Arts de Nancy ou au cœur de la Villa Majorelle, manifeste de l’Art nouveau.
Bien plus tardivement, l’aventure naturaliste se poursuit à Nancy à travers les lampes créées par Cayette en collaboration avec Daum. L’émergence de la Première Guerre mondiale mettra un terme à ces inspirations.
Émile Gallé suit le mouvement
Créateur de tendance, mais également suiveur. Émile Gallé succombe à la mouvance, spectateur du succès grandissant des lampes Daum/Majorelle.
Émile Gallé débute la création de lampe dès 1899. Les premières pièces de qualité seront présentées en 1902, tout juste deux années avant sa mort. La ferronnerie est bien moins présente, elle semble pourtant réalisée dans ses ateliers, avenue de la Garenne.
Ses lampes en forme de fleur attestent de la grande maîtrise du verre. Les éléments électriques sont judicieusement cachés par un travail précis et méticuleux de la fleur, colorée et nervurée.
Parmi les pièces de prestige, nous pouvons citer :
- La lampe nénuphar, vers 1902
- Surtout lumineux, les Pontédéries, 1904
Pour en savoir plus, découvrez notre billet pour reconnaître un vrai vase Gallé.