Emile Friant, c'est l'un des plus grands artistes lorrains à connaître. Voici ce que vous devez savoir de ce génie ...
1) Emile FRIANT (1863-1932)
1.1 Emile Friant en quelques mots
Émile Friant est connu du grand public pour ces tableaux de grandes dimensions « La Toussaint » (1888) et « Les Amoureux » (1888), dont le réalisme de l’expression des personnages et la qualité picturale ne laissent pas indifférent l’amateur comme le passionné d’art.
Les œuvres de ce lorrain (dont certaines visibles au Musée des Beaux-Arts de Nancy) cachent un talent dissimulé dans des productions riches et variées que l’on retrouve parmi ses dessins, gravures et lithographies.
Cet artiste très apprécié par ses contemporains, n’a jamais perdu de sa notoriété.
1.2 L’enfance d'Emile Friant
Une enfance modeste, d’un petit lorrain de Dieuze qui grandit au contact de la nature dans un contexte familial chaleureux.
Sa mère travaille chez un couple de pharmaciens, les Parizot, qui se sont pris d’affection pour le petit Emile, en l’aidant dans l’enseignement de sa formation générale.
Il sera proche de ce couple. La guerre de 1870 arrivant, Emile Friant fuit l’occupation avec ses parents et la veuve Parisot en s’installant à Nancy.
D’autres grands artistes lorrains, comme la famille Daum, ont fait de même.
Il fréquente l’institution Loritz à Nancy, sans passion, mais en témoignant d’une attirance pour le dessin. Elle s’affirme et l’amènera vers l’Ecole Municipale de dessin de Nancy.
1.3 Sa formation
Dès l’âge de 15 ans, il se fait remarquer par la qualité de ses dessins et notamment les autoportraits, en exposant ses premières toiles.
Précoce, Il entre à l’Ecole Municipal de dessin de Nancy et travaille sous le regard de son maitre Louis Théodore Devilly (1818-1886).
Emile Friant poursuit sa formation à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris dans l’atelier d’Alexandre Cabanel (1823-1889) où il retrouve son ami Victor Prouvé (1858-1943).
1.4 Emile Friant le sportif
En 1893, à l’âge de 39 ans, il fonde avec Eugène Corbin (1861-1952), directeur des Magasins Réunis de Nancy (magasin situé au Printemps actuel), une société aérostatique.
Des clichés le montrent préparant son ballon sur la place Stanislas à Nancy.
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Cette activité lui a permis avec les membres de la société, de survoler la région et l’Allemagne…
Le tableau « Au pays des nuées » représente un ballon s’élevant au-dessus du plateau de Malzéville, dans des nuages composés de créatures célestes.
Grand sportif, il pratique la bicyclette et le canotage.
1.5. La vie privée d’Emile Friant
Jeune, il aimait se promener dans la nature. Passionné par la peinture, il travaillait énormément pour répondre aux commandes de particuliers français et étrangers.
Il s’entourait d’amis du milieu artistique. Emile Friant rencontrera dans les années 1893, Eugénie Ledergerber (1875-1970), 12 ans son cadet et issue d’une famille de huit enfants.
Il la représentera au premier plan avec une blouse rouge, dans les tableaux « Le repas frugal » (1894) et « Le pain » (1894).
Elle restera sa compagne toute sa vie.
1.6 Emile Friant et la politique
Il croit en des valeurs républicaines. En peignant les scènes de la vie quotidienne et les conditions difficiles des pauvres gens, il montre son attachement aux valeurs humaines.
Emile Friant se tient à l’écart de tout engagement politique, à la différence de Victor Prouvé (1858-1923) ou Emile Gallé (1846-1904).
2) L’œuvre d’Emile Friant
2.1 Le style Friant
Jules Bastien-Lepage (1848-1884), peintre et graveur naturaliste lorrain influença ses débuts.
Emile Friant réalise essentiellement des scènes et portraits qu’il trouve dans son cadre de vie :
- Personnages aux bords de la Meurthe
- Au cimetière de Préville
- Rue le pont de Malzéville …
Son style est précis et évoque la photographie inventée en 1839.
Membre de l’Ecole de Nancy (1901), il n’est pas vraiment dans l’esprit de ce mouvement de l’association, mais marquera par son style, cette époque.
2.2 L’œuvre de Friant
A travers son œuvre, l’artiste témoigne d’un talent multiple par la production importante de dessins, gravures, portraits et scènes quotidiennes.
Après 1900, la gravure occupe une place grandissante dans sa production. Cette activité devient une ressource importante.
A travers la technique de l’eau-forte et de la pointe sèche, son style réaliste et son dessin minutieux s’épanouissent pleinement dans les portraits, les scènes intimes ou les allégories politiques.
2.3 La collection du Musée des Beaux-Arts de Nancy
Plus de 1 500 œuvres constituent la collection Emile Friant dans ce musée.
Elles proviennent d’achats directement au peintre, de dons de l’artiste ou de particuliers.
Mais aussi d’acquisitions lors de ventes publiques et surtout du legs des fonds d’ateliers fait par l’artiste en 1932 à la ville de Nancy et à son ami Louis Burtin (1869-1938).
2.4 Les amitiés artistiques
Sa formation chez Louis Théodore Devilly permet à Emile Friant de se lier d’amitiés avec de nombreux artistes.
Nous pouvons citer :
- Le sculpteur et céramiste Ernest Bussière (1863-1913)
- Le peintre, sculpteur et graveur Victor Prouvé (1858-1943)
- Le peintre, relieur, affichiste et illustrateur Camille Martin (1861-1898)
- Charles de Meixmoron, peintre et industriel (1839-1912)
- Henri Royer (1869-1938), peintre et portraitiste
3) Le succès d'Emile Friant
3.1 Le succès outre-Atlantique dès les débuts
Grâce à une réputation grandissante en France, Emile Friant devient un professeur populaire et un portraitiste de renom alors que peindre des portraits traditionnels n’était plus à la mode.
Ses toiles sont achetées dès les années 1890 par des particuliers américains, suite à la notoriété qu’il rencontre dans les salons parisiens.
Ainsi, à 27 ans, il reçoit les honneurs du gouvernement français et il devient une personnalité artistique majeure des deux côtés de l’Atlantique.
L’œuvre « Ombres portées » devint très vite célèbre surtout lorsqu’elle fut exposée à Chicago en 1893. Sa représentation reste l’une des plus attirantes et mystérieuses de l’artiste.
3.2. Un succès grandissant lors de son vivant
Emile Friant était admiré à son époque comme Victor Prouvé (1858-1943), Henri Royer (1869-1938) ou Emile Gallé (1846-1904).
La finesse dans la réalisation des portraits (ceux de la famille Coquelin sont remarquables), son style photographique, mais également ses représentations de la vie quotidienne, lui permettent d’acquérir tout au long de sa carrière succès et titres officiels : comme un second Prix de Rome à l’âge de 20 ans.
A 26 ans, il reçoit la médaille d’or à l’Exposition Universelle de 1889 pour le tableau « la Toussaint » (1888), et est fait Chevalier de la Légion d’honneur par l’Etat pour le musée du Luxembourg à Paris.
Il se constitue une clientèle fidèle avec les expositions dans les salons parisiens, qui lui permettent de rentrer en contact avec ceux d’autres régions de France, sans compter la fidélité des collectionneurs de Nancy.
En 1923, il devient membre de l’Académie des Beaux-Arts et sera promu en 1931, commandeur de la Légion d’honneur.
3.3. Des commandes publiques
Emile Friant répond aux commandes publiques qui lui sont proposées.
Ainsi pour la ville de Nancy, il réalisera en 1891 deux panneaux décoratifs au thème champêtre « Les jours heureux » composé de deux panneaux « L’enfant couronné de fleurs » et « L’enfant endormi » pour les salons de l’Hôtel de Ville, les médaillons muraux de la partie haute seront confiés à Victor Prouvé.
Ils sont visibles au Musée des Beaux-Arts de Nancy.
3.4 Le succès après sa mort
Emile Friant décède le 9 juin 1932.
Ses obsèques seront célébrées à Paris, puis à Nancy où il sera enterré au cimetière de Préville.
La même année une exposition rétrospective aura lieu. Puis toujours à Nancy d’autres expositions lui seront consacrées en 1933, 1937 et enfin du 4 novembre 2016 au 27 février 2017 au musée des Beaux-Arts de Nancy.
Le public témoigne profondément de la passion qu’il a pour cet artiste lorrain, en étant fidèle au rendez-vous de ces expositions.
3.5 Le succès en salle des ventes
Jean-Louis Burtin (1878-1940), sculpteur, ami proche de l’artiste, collectionnera toute sa vie les œuvres de Friant.
Il sera légataire de ses gravures avec la ville de Nancy.
En juin 2017 aura lieu dans une salle nancéenne de ventes, la présentation de 250 œuvres provenant du fonds de Jean-Louis Burtin, composé majoritairement de gravures et dessins.
En 2018, 18 œuvres de la collection du sculpteur provenant des descendants de Jean-Louis Burtin, seront mis en vente à Paris.
Elle sera dispersée dans le monde entier avec des records pour l’adjudication du tableau « La discussion politique » 212 500 € hors frais.
Auparavant en 2005, l’œuvre « Ombres portées » avait été acquise 508 000 € hors frais par le Musée d’Orsay de Paris, lors d’une vente organisée aux Etats-Unis.
4) Quelques anecdotes et des aspects insolites d’Emile Friant
4.1 Acte de vandalisme sur le tableau « Les amoureux »
C’est à l’âge de 25 ans qu’Emile Friant réalise le célèbre tableau « Les Amoureux » (1888), Idylle sur la passerelle » ou intitulé également « Soir d’automne ».
En 1912, l’œuvre est vandalisée par des brûlures de cigares sur l’œil du jeune homme et la joue de la jeune fille. La restauration sera réalisée en urgence par l’artiste.
4.2 Peintre de procès et de décapités
Curieux de nouveautés, il décide d’assister à des procès d’assises.
Assis parmi le public, il dessine les scènes de plaidoiries, allant jusqu’à réaliser des portraits de décapités, comme « La Messe du Condamné » (1900) ou « La Peine Capitale » (1908).
4.3 Caricaturiste et dérision
Emile Friant aimait la caricature et la dérision.
On retrouve ce style de dessins dans des cartes de vœux réalisées par ses soins, pour des commandes de particuliers et également dans des gravures.
Le tableau « Le Buffet » (1884) représentant des bourgeois à table mangeant avec leurs mains avec des traits grotesques et caractérisés, témoigne de ce trait d’humour du peintre.
4°) Quelques ouvrages sur Emile Friant
- Emile Friant (1863-1932) Le dernier naturaliste par Villeneuve de Janti
207 pages – Editions Somogy – 28 € – 2016 - Au revoir Monsieur Friant par Philippe Claudel
94 pages – Livre de Poche -15 € – 2019 - Emile Friant, un autre regard – 77 pages – épuisé – Conseil Général de la Moselle – 2006
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Christophe Garland est un passionné de l’art verrier, retrouvez ses articles sur son blog – leverreetlecristal.wordpress.com